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Iran : Donald Trump a franchi la ligne rouge

Publié le 06/01/2020 14:11
Mis à jour le 09/07/2023 12:32
CL
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Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr

Le grand drapeau rouge, symbole d’une promesse de vengeance inexorable (qui doit être accomplie quoi qu’il en coûte, fusse au prix d’une longue guerre), a été hissé pour la première fois de l’histoire de l’Iran au-dessus du dôme de la mosquée de Jamkaran de Qom, l’un des lieux les plus saints du chiisme.

Il s’agit là d’une réponse symbolique très forte à l’assassinat du général iranien Qassem Soleimani, une opération commanditée par Donald Trump qui fait couler beaucoup d’encre.

Elu entre autres sur la promesse de désengager les Etats-Unis du Proche-Orient et de ne pas exacerber les tensions dans le Golfe, le président américain s’est en réalité assuré de devoir y mener une guerre sur l’ensemble des fronts (Irak, Syrie, Liban…), sans compter l’offensive turque contre le Kurdistan.

Quant à sa décision d’éliminer le général Soleimani, commandant en chef des forces “Al Qods”, l’unité d’élite des Gardiens de la révolution iranienne, une sorte de synthèse de la CIA et des « forces spéciales », elle porte sur l’un des personnages les plus puissants et les plus estimés du pays, l’équivalent d’un numéro deux du régime.

Ancien commandant des forces engagées sur des théâtres d’opérations extérieurs, mais aussi dans des missions assurant – au prix d’une répression sanglante cet automne – le maintien au pouvoir des mollah et du numéro un, le guide suprême Ali Khamenei, Qassem Soleimani et ses troupes s’étaient par ailleurs illustrés depuis quatre ans dans la lutte contre l’Etat Islamique en Syrie et en Irak (tout comme les Américains) et avaient autrefois collaboré avec le Pentagone dans la lutte contre les Talibans en Afghanistan.

Le procédé (un tir de missile provenant d’un drone de combat) utilisé pour l’assassiner est identique à celui infligé à un simple émir autoproclamé d’un califat terroriste en Afghanistan ou au Maghreb subsaharien. Surtout, jamais depuis l’affaire de l’ambassade de Téhéran (il y a quarante ans) les Etats-Unis n’avaient choisi d’exécuter un haut dignitaire iranien, privilégiant systématiquement des sanctions économiques (gel de comptes à l’étranger, confiscation d’avoirs sur le sol américain etc.).

Donald Trump vient donc de basculer dans une autre logique, alors que les Gardiens de la révolution iraniens sont classés depuis avril dernier comme une organisation terroriste, tout comme le Hezbollah (le « parti de Dieu ») avant lui. De ce fait, les « patrons » de ces organisations ne sont donc que des « chefs terroristes » et le Président des Etats-Unis puise donc dans ce statut la légitimité de leur neutralisation.

La Maison-Blanche et le Pentagone invoqueront ensuite le prétexte habituel d’une « menace mortelle écartée de justesse », du « criminel de guerre puni pour ses actes, car ayant causé la mort de soldats américains ».

Quelques supporteurs « bas de plafond » du président américain se réjouissent par ailleurs sur les réseaux sociaux qu’il y ait « un salopard de moins » sur cette planète – un « salopard » rapidement remplacé par un autre à la tête des forces “Al Qods”, avec cette fois-ci la mission de combattre les Etats-Unis partout et par tous les moyens… et de nuire à leurs alliés de façon systématique dans la région.

Car l’assassinat de ce haut dignitaire iranien qualifié de « criminel » signifie pour Washington :

– l’arrêt de toute coopération objective dans la lutte contre l’Etat Islamique et autres mouvances salafistes en Syrie et en Irak,

– des risques d’attaques contre des installations pétrolières de l’allié saoudien,

– des risques d’attaques contre des tankers ou des navires marchands en provenance d’Arabie Saoudite,

– un soutien accru aux rebelles Outhits au Yémen et aux séparatistes chiites saoudiens

– l’éviction des troupes américaines du sol irakien (elles devront se rabattre vers Bahreïn, le Qatar ou l’Arabie Saoudite),

-des attaques informatiques contre les entreprises américaines et toutes les administrations américaines (plusieurs ont déjà été recensées ce week-end)

Le Proche-Orient pourrait sombrer dans le chaos

Mais surtout, le risque est de plonger tout le Proche-Orient dans une situation de guerre asymétrique et systématique extrêmement coûteuse pour les Etats-Unis.

Tout le monde sait bien que Téhéran serait écrasé militairement en quelques heures en cas de confrontation militaire « classique » avec les Etats-Unis et certains de ses fidèles alliés de la région. Cependant, le président américain continue de faire monter la pression en menaçant de bombarder 52 sites stratégiques en Iran (il s’agirait d’autant d’actes de guerre), contraignant ce faisant à déclencher vendredi dernier un conflit impossible à gagner pour l’Amérique… et qui va faire exploser la facture de la présence américaine dans le Golfe, et donc l’endettement des Etats-Unis.

Et si le pétrole se met à flamber, c’est le consommateur qui paiera la facture, le cycle économique risquant au surplus de se retourner.

Le chef de l’exécutif américain semble toutefois n’en avoir cure et fait manifestement le pari que le conflit avec l’Iran – en interne – sera payant sur le plan électoral (il sera perçu comme un vrai « chef de guerre »). De même, il semble croire qu’à l’extérieur, le régime des Mollah, asphyxié financièrement (une rumeur évoque une faillite imminente voire effective de la Banque Centrale iranienne) va s’effondrer, car les Iraniens ne voudront pas mourir au profit de dirigeants corrompus qui viennent de faire réprimer dans le sang – Qassem Soleimani en fut l’instrument – les récentes révoltes provoquées par les pénuries et l’hyperinflation.

Reste qu’aux yeux de toutes les chancelleries, quelles que soient les justifications avancées par la propagande néo-conservatrice, c’est bien Donald Trump qui a versé « le premier sang » et qui, plus grave encore, a introduit un concept pseudo-diplomatique extrêmement dangereux : le droit d’assassiner de hauts dignitaires étrangers présentés comme des « nuisibles » ou des « salauds », une forme d’ingérence humanitaire en mode « radical ».

Dans quelle catégorie le président américain classe-t-il Kim Jong-un, lequel oppresse son peuple – dans des proportions qui font figurer les Mollahs iraniens au rang d’amateurs – et vient d’ordonner la reprise des essais nucléaires (car la Corée du Nord, contrairement à Téhéran, possède la bombe atomique), et accroît depuis des années les menaces contre le Japon (régulièrement survolé par des missiles nord-coréens) et les bases militaires américaines dans le Pacifique ?

Il apparaît désormais certain que les électeurs iraniens choisiront la voie de la radicalité lors des élections de fin février et il est tout aussi vraisemblable que Téhéran ne négociera plus rien ni avec les Etats-Unis, ni avec les pays qui ont approuvé l’opération de la nuit du jeudi 2 au vendredi 3 janvier.

Last but not least, l’Iran n’a plus aucune raison de se refuser une nucléarisation dont Kim Jong-un a su faire un si bon usage.

Entre puissances atomiques, au moins, on se respecte et on se jette même des fleurs (Kim Jong-un est un « type tellement intelligent » aux yeux de Trump), on ne s’entre-dégomme pas ses généraux comme dans un vulgaire règlement de compte mafieux !

Et Wall Street dans tout cela ? Les indices américains ont fait preuve d’une résilience remarquable vendredi, avec des écarts à la baisse qui sont restés plus que limités, et même anodins (de -0,7 à -0,8%) au regard des 12,5 à 15% gagnés depuis le 2 octobre dernier.

Quant à la psychologie des opérateurs avec le surgissement d’un risque de guerre, alors que la jauge « fear & greed index » a pulvérisé jeudi un record à 98, je vous la résume d’une seule formule bien connue : « il faut acheter au son du canon ».

Nous saurons bientôt s’il s’agit d’une preuve de légèreté insondable alimentée par une confiance aveugle quant à la capacité de la FED a prévenir tout repli de Wall Street… ou s’il s’agit d’une attitude visionnaire, la Réserve fédérale ayant souvent démontré sa capacité à prévenir tout repli.

A moins qu’elle ne se saisisse de l’occasion pour faire exploser Trump en plein vol, à la suite d’une correction boursière dont il porterait, par son aventurisme, l’entière responsabilité…

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